L’Histoire d’un Joueur §2 : Être un joueur qui ne joue (presque) pas

En 2006, Nintendo sort sa nouvelle console, la Wii. Fanboy de la firme de Mario et joueur avide sur GameCube (leur console précédente), je me procure la nouvelle bête en 2007. Et me la fait voler dans un cambriolage quelques temps plus tard. La même semaine, j’apprends que je vais être papa. C’était un signe, qui m’annonçait que quelques mois plus tard je n’aurais plus les dizaines d’heures nécessaires pour rassembler les triforces d’un Zelda ou pour vaincre dans les innombrables escarmouches d’un Fire Emblem.

Mon fils est né et… ah, les délices de la paternité. Pour gagner des points d’expérience et des niveaux en tant que « papa » il me fallait remplir des missions à faire pâlir Sisyphe telles que changer huit couches par jour ou calmer d’intarissables tempêtes de larmes. Je passais désormais mon temps libre à m’occuper de mon petit loup. Les années ont passé, je devenais père d’une fratrie de deux garçons et n’avais plus le temps pour un loisir aussi chronophage que le jeu vidéo.
Pourtant, je restais un joueur. Les jeux vidéos me manquaient. Et j’ai trouvé un moyen. Des jeux conçus pour satisfaire mes envies en matière de gameplay mais qui restaient compatibles avec mon emploi du temps. Parce que oui, j’avais parfois une demi-heure à moi. Parfois une heure. Ici et là. Des fragments qui mis bout à bout allaient me permettre d’éprouver à nouveau le plaisir du jeu. Restais à savoir comment.

Candy Box, le jeu qui se joue tout seul

Peu connu et peu populaire, le jeu incrémental était la solution la plus évidente. Le principe : un jeu qui se contente d’un minimum d’interactions et dans lequel le joueur progresse en ne faisant rien d’autre que… d’attendre. Attendre qu’une monnaie virtuelle quelconque s’accumule sans effort, ou qu’une série de monstres soient vaincue automatiquement. Un bon jeu incrémental possède même un mode « hors ligne » qui compte les ressources quand le joueur ne joue pas, qu’il travaille, dort ou change les couches de son deuxième fils. Le joueur est ainsi « récompensé » de ne pas jouer.
Candy Box est le premier jeu du genre auquel j’ai joué. Il démarre sur un écran vide. Oui, vide. Ah si, vous possédez 0 bonbons. Puis le jeu vous informe que vous avez gagné un bonbon. Puis un deuxième. Vous gagnez un bonbon par seconde. Youpi ! Que faire de ces bonbons ? Les jeter par terre ? Les manger ? Ou juste… les laisser s’accumuler ? Que se passerait-il si vous en aviez accumulé, disons soixante ? Voici le point de départ d’une aventure qui vous mènera de surprise en surprise, dans un monde toujours plus sucré et qui se joue en grande partie tout seul.

Gratuit – https://candybox2.github.io/candybox

Passage, le jeu qui se termine en cinq minutes

Le meilleur service que je peux vous rendre est de vous conseiller de jouer à Passage. C’est un jeu qui m’a fortement touché, au point que je m’en rappelle avec émotion et que je vous en parle quinze ans après l’unique partie que j’ai faite de ce jeu. Une unique partie de… cinq minutes. Montre en main. Cinq minutes pour vivre l’entièreté d’une vie humaine. Je ne vous en dis pas plus.

Gratuit – http://passage.toolness.org

Darkest Dungeon, le jeu qui se joue par petits bouts

Pour celui-là, le joueur averti va être confus. A l’inverse extrême de Passage, Darkest Dungeon a une durée de vie de soixante heures au bas mot. C’est pourtant dans ce contexte de « joueur qui ne joue pas » que j’ai entrepris et complété la bête. Parce que s’il est long, Darkest Dungeon a une caractéristique qui le rend compatible avec la vie trépidante d’un jeune père.
Darkest Dungeon est un jeu de rôle tactique dans lequel le joueur envoie au charpie des groupes d’aventuriers en les faisant affronter des hordes de monstres cthuliens dans des couloirs claustrophobiques, jusqu’à la mort, la folie ou la victoire. Un jeu exigeant et difficile.
Darkest Dungeon a pourtant été mon ami. Car le jeu possède une grande « granularité ». L’expérience de jeu peu être fragmentée à l’infini. Sa longue campagne est composée de « missions », missions divisées en séries de combats, eux-même divisées en tour de jeux durant lesquels héros et monstres attendent sagement leurs tours pour agir. Bien sûr, il est possible de quitter le jeu n’importe quand et de le reprendre au même endroit, exactement. Une session de jeu dure ainsi le temps dont le joueur dispose, pas plus, sans compromis, et peu être interrompue à tout moment. Faut juste être prêt à étaler la partie sur de nombreux mois. Yeah !

Nintendo Switch

Ok ok, c’est une console et non un jeu. Et d’accord, quand je m’y suis mis j’étais sorti de ma période « joueur qui ne joue pas ». Mais je tenais à mentionner ici que si j’avais mis la main sur cette console à temps j’aurais apprécié son extrême souplesse : à la fois console portable et de salon, la console hybride de Nintendo peut être mise en pause à tout moment, dans n’importe quel jeu, pour une reprise ultérieure millimétrée. De quoi fragmenter n’importe quel jeu en mini séances. Au moment où j’écris ces lignes il m’est possible de passer un peu plus de temps à jouer, mais voilà une fonctionnalité que j’apprécie particulièrement et grâce à laquelle j’ose parfois lancer un jeu pour moins d’un quart d’heure.

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