J’ai toujours été perplexe face personnages animaux anthropomorphe dans les fictions. Une opinion alimentée par une question simple : pourquoi ? Pourquoi prendre un chat, un chien ou un ours, le rendre bipède, l’habiller comme un humain, le faire parler comme un humain et lui faire vivre des histoires d’humains ? J’avoue m’être fait cette idée à force de lire les mièvres histoires pour tout petits façon Petit Ours Brun, mais je suis curieux.
Peut-être une question d’identité graphique assumée, de paresse du dessinateur (i.e. les histoires de lapins de Lewis Trondheim) ou de mise à distance (i.e. Maus aurait été insupportable autrement). Ou juste l’amour pour les animaux.
D’un autre côté, il y a Anna et Froga. L’oeuvre dudit Lewis Trondheim. Des fois j’adore.
Je pourrai maintenant vous parler de Zootopie, le génial film de Walt Disney qui déconstruit le sujet. Mais j’ai retrouvé la même saveur en plus mature dans Beastars, et c’est mon sujet du jour (notez comme je suis plus bavard que d’habitude).
Je n’aurai jamais lu Beastars si on ne me l’avait pas conseillé. Parce que anthropomorphisme. Mais on me l’a bien vendu, j’ai emprunté le premier tome dans une médiathèque, qui m’a plu au point que j’ai enchaîné presque sans pause avec le reste de la série.
Beastars est un manga seinen en 22 tomes signé Paru Itagaki. Un monde proche du notre, mais où les humains cèdent la place, vous l’avez deviné, à des animaux anthropomorphes. Toutes les espèces sont représentées. Ça commence dans un lycée, avec un meurtre. Celui de Tem, un Alpaga, retrouvé mort et dévoré par un assassin non identifié. Les soupçons se tournent immédiatement vers les carnivores de son club de théâtre.
Le ton est donné : dans l’univers de Beastars les ‘herbis’ côtoient les ‘carnis’. C’est une société apaisée, même les loups et les lions se nourrissent avec des légumes et des céréales. Mais ceux-ci conservent leur instinct de prédateur, ils doivent composer avec leurs envies et frustrations. Il y a des accidents. Les herbis vivent ainsi entourés de prédateurs potentiels. Pourtant herbis et carnis vivent ensembles, partagent les mêmes préoccupations et les mêmes rêves, se lient d’amitié voire tombent amoureux.
Beastars est un manga exceptionnel. Les aventures de Legoshi et de ses amis mettent en permanence le lecteur an appétit, avant de le rassasier avec des rebondissements ou des révélations. Certains éléments narratifs m’ont tenus en halène tout du long.
D’abord, le dessin de Paru Itagaki est une franche réussite. Les personnages sont bien dessinés et immédiatement reconnaissables. En une image on en reconnait une espèce animale, mais aussi un sexe, un âge, une humeur et un état d’esprit général. Chapeau base la mangaka.
Il y a régulièrement un effet que je nommerais « page surprise ». Vous tournez une page, et un élément graphique vous prend au dépourvu. Le dessin occupe toute la page et vous fait dire « wow » par son effet inattendu. Révélations, retournements de situations, introductions de nouveaux personnages, je suis stupéfait et conquis.
Les thèmes abordés sont pertinents. Ces relations entre espèces animales nous renvoient à nos propres préoccupations. Sexisme, racisme, tout est là.
Je passe sur l’essentiel : l’intrigue est passionnante, les personnages sont attachants et bien développés, le rythme est soutenu. C’est un manga qui vous prend aux tripes et ne vous lâche plus.
Pour marquer le coup, j’ajoute un tag « coup de foudre » à ce blog, qui distinguera les oeuvres que je trouve incontournables des plus simples « coups de coeur ». Et je mets à jour mes précédentes chroniques.